L'induction est le raisonnement qui permet de passer du particulier au général, ou du fait à la loi. Toute loi se compose d'un rapport de causalité entre deux ou plusieurs faits d'observation. Toute induction se composera donc de deux moments:
1e Moment. On constate que la cause dans un certain nombre de cas est la pesanteur de l'air. Il trouve ainsi une loi qui régit le phénomène dans les cas donnés. Le rapport de causalité cherché est déterminé pour un certain nombre d'expériences particulières.
2e Moment. Ce rapport observé seulement dans un certain nombre d'expériences, on l'étend à toutes les expériences possibles, et l'on dit que la cause universelle des variations de la hauteur de la colonne barométrique est la variation de la pesanteur de l'atmosphère. Dans le premier moment, on cherche un rapport de causalité. Comment le déterminer?
Pour cela, Mill dans sa Logique indique 4 méthodes: de concordance, de différence, des variations concomitantes, des résidus.
Dans le second moment de l'induction, on étend à l'universalité
des cas possibles le rapport observé dans quelques cas donnés.
Qu'est-ce qui autorise cette extension du particulier à l'universel?
Autrement dit, quel est le principe de l'induction?
Si l'on s'en tenait à un texte d'Aristote, il semblerait que ce philosophe ait fait du principe d'identité le fondement de l'induction; il semble en effet ramener cette dernière à un syllogisme. Voici l'exemple donné:
[Avant d'attaquer cette théorie, il y a une réserve d'histoire à faire. La théorie complète d'Aristote reconnaît bien à l'induction une nature et des lois spéciales. C'est seulement une certaine forme d'induction qu'il ramène au syllogisme, et encore fait-il intervenir dans sa théorie un principe métaphysique spécial, le [Greek].]
On passe là d'un fait à une loi; il semblerait donc que le raisonnement inductif put se ramener au syllogisme, qu'il n'y eut par le fait qu'un seul raisonnement; le raisonnement déductif.
Mais en étudiant le syllogisme d'Aristote, on remarque qu'il a un caractère bien particulier: le moyen terme et le petit terme y ont une égale extension. La mineure affirme que tous les individus chez qui se trouvent les caractères généralisés dans la conclusion ont été observés. Mais presque toujours, l'induction généralise sans avoir observé tous les individus. On a déterminé les lois de la pesanteur sans avoir pu les vérifier par l'observation de tous les corps pesants. Or, le syllogisme inductif d'Aristote n'est vrai que si tous les cas possibles ont été observés et sont énumérés dans la mineure, ce qui est pour ainsi dire impossible.
L'induction ne peut donc pas se ramener à la déduction; elle consiste à passer du particulier au général, ce qu'on ne saurait expliquer par le seul principe d'identité. Entre le particulier et le général, il y a un abîme; l'induction le franchit; mais au moyen de quel principe?
Suivant Reid et les Ecossais, ce principe n'est autre chose qu'une croyance instinctive de l'esprit humain à la stabilité des lois de la nature. Voilà ce qui nous permet de généraliser le particulier. Si nous croyons que en tout lieu et en tout temps les corps pesants obéissent aux mêmes lois, c'est que nous croyons la nature immuable.
Cette croyance est indéniable. Mais pour qu'elle puisse servir de fondement à l'induction, il faut qu'elle repose sur un principe rationnel: c'est celui de causalité. Tout phénomène a une cause. Il en résulte immédiatement qu'une même cause, toutes les circonstances étant les mêmes, doit produire les mêmes effets. En effet dans ce cas, rien n'empêche A de produire B; là non apparition de l'effet n'aurait donc pas de cause. Or, comme toute loi est un rapport de causalité, la loi vraie dans un cas le sera dans tous les cas identiques.
Nous trouvons ici un fait nouveau qui contredit la théorie empirique
de la connaissance. La raison pour cette théorie, se forme à la
suite d'une induction: mais nous venons de faire voir que l'induction
suppose le principe de causalité: le cercle vicieux est flagrant.
Pour que les lois aient cette valeur universelle sans laquelle
il n'est pas de science, il faut qu'elles reposent, non sur un
principe contingent dérivé de l'expérience, mais sur une vérité
nécessaire venant de la nature même de l'esprit; sinon, le principe
de causalité n'est qu'une perpétuelle hypothèse que de nouveaux
faits peuvent démentir du jour au lendemain.