1884a(47)
Lecture 47. Des sophismes
- Définition du sophisme
- Qu'est-ce qu'un sophisme?
- Classification de Bacon
- Idola tribus
- Idola specus
- Idola fori
- Idola theatri
- Critique de cette classification
- Divisions des sophismes: sophismes d'induction; sophismes de déductions
- Sophismes de déduction
- Ignorance du sujet
- Pétition de principe
- Cercle vicieux
- Ambiguïté des termes
- Sophismes d'induction
- Post hoc, ergo propter hoc
- Sophisme consistant à passer du général au particulier, de la
substance à l'accident, de l'absolu au relatif, et vice versa
- Dénombrement imparfait
Lecture 47. Des sophismes
Nous venons de voir dans quelles conditions l'induction et la
déduction donnent des résultats vrais. Nous allons maintenant
examiner les erreurs découlant de raisonnements illégitimes, ou
sophismes.
Une classification célèbre des sophismes est celle de Bacon. Il les nomme idola [Greek], les comparant à des fantômes qui viennent obscurcir
et troubler l'entendement: il en distingue quatre formes:
- Idola tribus, erreurs communes à l'espèce entière, venant de la nature même
de l'homme en général; par exemple, les erreurs provenant des
limites et de l'étroitesse de l'esprit; les erreurs causées par
le besoin d'harmonie inhérent à la nature humaine; les erreurs
naturelles des sens.
- Idola specus, idoles de la caverne, provenant des défauts propres à l'individu.
Ainsi ayant une prédilection pour une science, on dénature les
natures pour les y ramener.
- Idola fori, erreurs naissant du langage. Le forum est ici considéré comme
le lieu des conversations.
- Idola theatri, erreurs naissant des sectes philosophiques, venant de l'esprit
de système. Bacon se représente les philosophes de tout temps
comme jouant sur un théâtre.
Mais les termes employés par Bacon sont vagues, aussi bien que
les idées qu'ils recouvrent. Cette classification est seulement
importante au point de vue historique: elle montre que Bacon voyait
bien que la cause de l'erreur est souvent subjective. Mais cette liste des sophismes n'est ni assez exacte, ni assez
complète.
Nous avons admis deux sortes de raisonnements, nous avons donc
deux sortes d'erreurs: les sophismes de déduction et les sophismes
d'induction.
Sophismes de déduction.
- Ignorance du sujet - Ignoratio elenchi. Elle consiste à prouver trop, à prouver
pas assez, à prouver à côté. Cette erreur est très fréquente.
Ainsi si dans une assemblée on discute s'il faut faire la guerre,
un orateur pourra commettre une ignoratio elenchi s'il prouve
que la guerre est injuste, en général, car il prouve trop; on
ne parle pas de guerre en général; s'il prouve qu'elle est avantageuse,
car il ne prouve pas assez; cela ne suffit pas; s'il parle de
la grandeur et de la gloire du pays, car il prouverait à côté;
il n'est pas sûr que la guerre ait ce résultat.
- Pétition de principe. Elle consiste à supposer ce qui est en question. Ainsi il y
a pétition de principe dans le raisonnement des positivistes,
qui construisent le moi avec des états de conscience, ce qui suppose
déjà l'existence du moi.
- Cercle vicieux. Il consiste à prouver deux propositions en question l'une par
l'autre. Il y a un cercle vicieux dans le raisonnement souvent
attribué à Descartes, bien qu'à tort, et qui prouve la véracité
divine par l'autorité de l'évidence; l'autorité de l'évidence
par la véracité divine.
- Ambiguïté des termes. Un syllogisme devant contenir trois termes et rien que trois
devient faux si un terme est pris dans deux sens différents, car
cela revient à avoir quatre termes. C'est en cela que consiste
la fausseté du syllogisme:
Les faiseurs de projet ne méritent pas de confiance;
Or, cet homme a fait un projet;
Donc, il ne mérite pas confiance.
Sophismes d'induction:
- Post hoc, ergo propter hoc. Prendre pour cause ce qui n'est qu'un antécédent. Ainsi prendre
pour cause de la mort d'un grand personnage, un phénomène astronomique
qui coïncidait avec elle.
- Une seconde forme de sophisme d'induction consiste à passer de
l'accident à la substance, du relatif à l'absolu, et vice versa. Ainsi l'on dira: un tel a guéri un malade, donc,
il est bon médecin; un tel est bon médecin; donc, il guérira ce
malade.
- Dénombrement imparfait, qui consiste à conclure en général sans avoir examiné les divers
cas particuliers. Par exemple, en voyant l'eau monter toujours
dans le vide, on avait cru que la nature avait horreur du vide;
on avait négligé le cas où la hauteur du vide est supérieur à
32 pieds, et où l'eau ne monte plus.
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